Première star internationale, celle qu’on appelait “La Divine” a employé sa notoriété pour se construire une image de marque

des débuts mystérieux

À propos de celle qui a soigneusement entretenu sa légende, il reste peu de traces de sa famille. Son acte de naissance a de toutes façons brûlé dans l’incendie de l’Hôtel de Ville en 1871 lors de la Semaine Sanglante.

George Clairin, Portrait de Sarah Bernhardt, 1876
George Clairin, Portrait de Sarah Bernhardt 1876, huile sur toile, 200 x 250 cm
Petit Palais, Paris

Fille d’une modiste et petite-fille d’un forain néerlandais, Sarah Bernhardt est délaissée par sa mère qui lui préfère la vie mondaine parisienne. Quant à son père, son identité a toujours été gardée secrète. Sarah Bernhardt grandit en Bretagne auprès de sa nourrice. Dés l’enfance, elle se fait remarquer par son comportement excentrique : elle se serait ainsi jetée par la fenêtre lors d’une visite de sa tante à Quimperlé pour la supplier de la ramener à Paris.

C’est au couvent qu’elle joue son premier rôle, un ange dans un spectacle religieux. À 14 ans, elle quitte les ordres pour passer avec succès le concours du conservatoire. Elle prend également des leçons d’escrime dont elle tirera profit pour des rôles masculins comme celui d’Hamlet.

triomphes

En 1862, sur la recommandation du Duc de Morny (amant de sa tante), elle entre à la Comédie Française et fait ses premiers pas dans Iphigénie, mais se fait renvoyer peu après pour avoir giflé une sociétaire. Devenue grande courtisane, sa vie privée défraie la chronique.

Elle signe un contrat avec l’Odéon, à condition de se “montrer plus docile”. Pendant le siège de Paris par la Prusse, elle transforme le théâtre en hôpital. Son interprétation dans Ruy Blas en 1872 conduit Victor Hugo à l’appeler “la Voix d’Or” au moment du banquet donné pour la centième représentation. Elle est rappelée par la Comédie Française et triomphe dans Phèdre puis Hernani.

En 1880, elle crée sa propre compagnie et se produit à l’étranger jusqu’en 1917. C’est la première comédienne a avoir tourné sur différents continents. Jean Cocteau parlera à ce titre de “monstre sacré”.

Proche d’Oscar Wilde, elle lui commande Salomé dont elle incarne le rôle-titre en 1892. Elle joue des rôles masculins, inspire à Edmond Rostand L’Aiglon. L’ année suivante, elle prend la direction du Théâtre de la Renaissance où elle renouvèle ses succès (Phèdre, La Dame aux Camélias, Lorenzaccio). Sarah Bernhardt aura en tout joué dans plus de 120 spectacles. Elle voit les débuts du cinéma muet et parlant, apparaissant à l’écran à plusieurs reprises.

Répertoire

Sarah Bernhardt est restée dans les mémoires pour son style emphatique et son élocution dramatique. Tant dans le langage corporel que la déclamation, elle se distingue par un jeu de scène cérémonieux.

Dès son adolescence, le duc de Morny lui donne la possibilité de suivre des cours d’arts plastiques. Après la guerre de 1870, la crise économique l’amène à fréquenter l’Académie Julian pour apprendre le modelage et la peinture à travers l’anatomie; elle se perfectionne sous l’égide de Roland Mathieu-Meusnier et Jules Franceschi.

D’abord attirée par le naturalisme (Après la tempête, 1876) ses pièces influencées par le symbolisme se chargent d’une teinte plus sombre. Avec Le Fou et la Mort, elle revient au théâtre : le bronze représente le héros du Roi s’amuse, Triboulet. Dans ce drame romantique de Hugo, c’est un être difforme et cruel qui conduit le roi aux pires débauches.

Sarah Bernhardt expose au Salon de 1874 à 1897, où elle est admirée par la critique, comme celle d’Émile Zola. Sa Jeune fille et la Mort de 1880 est reçue “moins comme un résultat qu’une promesse”. Elle présente une dague-sculpture intitulée Algues à l’Exposition Universelle de 1900. Travaillant le bronze, la terre cuite et le marbre, les lignes fluides et l’aspect végétal de ses oeuvres sont inspirées de l’Art Nouveau. Elle s’essaie à des genres et dimensions variés, que ce soit la statuaire monumentale ou de petites pièces décoratives.

Sarah Bernhardt dépeint ses amis artistes, comme ce portrait de Louise Abbéma. Elle traite aussi de thèmes allégoriques qui donnent lieu à de curieux assemblages, ainsi qu’en témoigne cet autoportrait de fantaisie conservé au Petit Palais. C’est sa sculpture la plus connue et la plus reproduite. On connaît une quarantaine d’oeuvres de sa main, plusieurs ayant disparues : www.culture.gouv.fr/Sites-thematiques/Musees/Nos-musees/Valorisation-des-collections/Les-femmes-artistes-sortent-de-leur-reserve/Icones/Bernhardt-Sarah.

une personnalité publique

Alphonse Mucha, Sarah Bernhardt
Alphonse Mucha, La Dame aux camélias, 1896, estampe 208 x 76 cm. Source: BNF/ Grand Palais, Paris

Soucieuse du contrôle de son image, la tragédienne choisit George Clairin et Louise Abbéma pour réaliser ses portraits officiels. Dotée d’une fibre commerciale redoutable, Sarah Bernhardt n’hésite pas à se mettre en scène et à associer son nom à des produits de consommation. Son style inspire la mode et la publicité; elle fait appel à Alphonse Mucha pour dessiner toutes ses affiches à partir de 1894.

Le 9 décembre 1896 est organisée une journée à la gloire de l’actrice par des figures artistiques, dont des peintres qui la représenteront comme Antonio de la Gandara. Après un gala au Théâtre Renaissance, elle se rend en grande pompe au Grand Hôtel, accompagnée de 200 fiacres.

Sarah Bernhardt prend régulièrement position au cours des débats qui agitent la scène politique française de cette fin de siècle. Elle soutient Louise Michel, puis Zola dans l’Affaire Dreyfus et s’oppose à la peine de mort. En 1914, on vient lui remettre les insignes de la Légion d’Honneur.

D’un tempérament plutôt morbide, il paraît qu’elle se repose régulièrement dans un cercueil. Face au scandale que cette pratique suscite, elle s’y fait photographier pour diffuser l’image dans la presse et sur cartes postales. Tuberculeuse depuis 1887, Sarah Bernhardt se fait amputer de la jambe mais continue à jouer sur scène, assise. On lui organise des obsèques nationales. C’est la première française à recevoir cet hommage.

Sarah Bernhardt est enterrée au Père Lachaise, et figure, bien entendu, sur le parcours de notre visite : womensarttours.com/visite/reanimer-les-gisantes-du-pere-lachaise/

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